Dotée d’une sacrée expertise dans la gestion de l’urgence, la sage-femme coordinatrice de la maternité de l’Hôpital d’Albi a initié de nombreux changements, notamment l’accentuation du travail en réseau au service d’une meilleure prise en charge des futures mamans.
Elle fait visiter la maternité à des futurs parents, soutient les sage-femmes de l’hôpital dans leurs problématiques du quotidien, règle les plannings, répond avec bienveillance à une maman, prépare les formations à l’urgence, un colloque ou un papier de recherche… La semaine de Christelle Graf, sage-femme coordinatrice à la maternité d’Albi, passe très vite ! Elle a cependant réussi consacrer un peu de temps à notre interview, qu’on pensait orienter en reportage en immersion. Nous n’avons pas eu besoin d’aller plus loin : l’échange était riche, complété par la participation à un colloque et le recueil du témoignage de nouveaux parents (à lire ici).
Sage-femme expert-pompier/ Une plongée dans l’urgence
Christelle s’est formée à Montpellier et y a passé 25 ans de sa carrière. Son parcours y a connu une inflexion particulière, une plongée inattendue dans l’urgence, aux côtés des pompiers, qui a été un révélateur pour elle. Elle se forme au métier de pompier puis inaugure le titre de « sage-femme expert-pompier » (lire ci-dessous). La gestion des naissances dans l’urgence reste un vrai sujet d’actualité, avec la parution d’un décret*. « Les sage-femmes ne sont pas formées à l’urgence et il y a un vrai besoin de compréhension des deux métiers pour que la collaboration se passe au mieux lors des accouchements inopinés, de plus en plus nombreux », relève-t-elle. C’est un sujet très actuel à l’hôpital d’Albi, puisqu’elle a démarré le processus pour former la trentaine de sage-femmes que compte la maternité. Elles font naître chaque année quelques 1200 bébés.
De nombreux changements sont en cours. Le plateau de consultation de la maternité d’Albi (pour y accéder facilement, suivez le guide) a été rénové en même temps que les urgences, et une grande salle de préparation à la naissance permet de réaccueillir les mamans et coparents. « Arrêtés avec le Covid, les cours de préparation à la naissance ont pu reprendre à la rentrée 2024, souligne la coordinatrice. L’hôpital propose cinq cours gratuits après inscription sur Doctolib« . L’accueil des coparents et des familles en salle de naissance a été amélioré et une salle des familles est en cours d’aménagement.
De gauche à droite, Julie De Micheli (chef de pôle femme mère enfant), Christelle Graf (sage-femme coordinatrice de la maternité) et Dr Marion Voyez (responsable du service d’obstétrique)
Hospitalisation de jour : un vrai plus
Le combat de Christelle Graf, c’est aussi de faire mettre en réseau tous les professionnels, de ville ou hospitaliers, et tous les spécialistes entre eux au service d’une meilleure prise en charge des patientes. Un service d’hospitalisation de jour a ainsi vu le jour : il permet aux mères ou futures mères de venir à l’hôpital où les professionnels se coordonnent pour que toutes les visites ou auscultations soient regroupés sur une demi-journée.
Une mise en réseau qu’elle soutient notamment pour améliorer la prise en charge des pathologies et grossesses à risque. « 40% des femmes sont accueillies en hospitalisation de jour pour un diabète de grossesse, souligne Christelle. Mais c’est aussi un vrai plus pour les patientes ayant des antécédents pathologiques et présentant des vulnérabilités. »
Ses conseils pour une maternité sereine
S’inscrire à l’hôpital dès le 3e mois de grossesse permet d’identifier les pathologies le plus tôt possible. L’échographie de datation doit être faite entre la 12e et la 14e semaine d’aménorrhée, ce qui offre juste 15 jours de délai. Le suivi des mamans au plus tôt, dès le 1er trimestre, est très important : c’est à cette période que peuvent être dépistées les maladies chromosomiques, un diabète de grossesse ou une hypertension chez la maman…
Pour un projet d’accouchement physiologique, il faut prendre le temps de le rédiger et de l’expliquer à la sage-femme en consultation. Celle-ci pourra faire visiter l’établissement et la salle physio, aménagée pour être visuellement le moins médicalisé possible et permettre un accouchement au plus naturel (elle dispose d’un lit parental et d’une baignoire pour soulager le travail). « On fait tout pour être au plus proche des projets de naissance, mais tout cela ne se discute pas le jour de l’accouchement », prévient la sage-femme dont le combat continue chaque jour, pour le bien-être des mamans, des co-parents et des petits bouts…
MG
Un parcours atypique
Après l’obtention de son diplôme d’état en 1996, Christelle Graf continue sa formation en échographie obstétricale puis devient en 2009 formatrice aux gestes de soins d’urgence. En 2011, elle continue avec un diplôme interuniversitaire en médecine fœtale suivi en 2018 d’un master 2 en soins humanité et société. En 2021, elle passe son master un en direction de la santé. En parallèle, Christelle est devenue sapeur-pompier puis sage-femme expert sapeur-pompier. Elle a participé à la création de l’Observatoire départemental de l’Hérault des accouchements inopinés extra hospitaliers (AIE).
Au début de sa carrière elle réalise son premier accouchement d’urgence avec les pompiers chez l’une de ses voisines d’immeuble en déni de grossesse. Elle n’est pas du tout préparée. « Ça a été violent pour la maman mais pour moi aussi j’ai trouvé qu’il y avait un gouffre entre le travail des prés hospitaliers livrés à eux-mêmes et celui des intra hospitaliers je me suis dit pourquoi ne pas leur apporter notre expérience de sage-femme ? Je suis allé voir les casernes à Montpellier et j’ai mis 10 ans à intégrer le corps des sapeurs-pompiers. Ce n’était pas simple… », témoigne-t-elle. Un évènement qui va orienter toute sa carrière…
Métier de sage-femme : du changement
Pour les jeunes en pleine orientation, sachez que l’accès à la profession de sage-femme en France a changé avec la création d’un troisième cycle des études en sciences maïeutiques et d’un nouveau diplôme d’État de docteur en maïeutique (Bac+6).
Dossiers parentalité : à relire dans nos archives…
Nous aimons publier, chaque printemps, un dossier dédié à la parentalité…
- En mars 2020 (N°5), nous avons mis le focus sur trois actions parentalité.
- Au printemps 2021 (N°8), nous nous sommes intéressés à la place du père.
- En mars 2023 (N°15), on vous a relaté notre rencontre avec Chantal Birman et son combat de toujours au service des mamans.